J’ai 2 papas …. et alors !

C’est durant la dernière semaine du confinement que j’échange avec Geoffrey. Et c’est un père heureux mais bien fatigué qui me raconte son histoire de papa. Il faut dire que deux mois confinés avec des jumeaux de 5 ans, ça laisse des traces perceptibles, même au travers son léger accent chantant du Sud. Geoffrey est gay et avec son mari Vincent, ils sont les 2 papas d’Eliot & Robin, qui viennent de fêter leur cinquième anniversaire. Une jolie famille au quotidien ordinaire. Une famille, comme toutes les autres. Une famille au parcours extra-ordinaire pour vivre le bonheur d’être 2 papas. Portrait d’un papa engagé, enthousiaste et aimant.

Une envie de paternité depuis toujours

Geoffrey & Vincent sont des amoureux cannois depuis 16 ans. Pour Geoffrey, cela a toujours été une évidence. Il serait papa.

Mais en tant que gay, il n’a alors pas d’idée précise de comment le devenir. « Je ne pensais même pas à l’adoption car pour moi, cela n’existait pas ». A 25 ans, au début de son histoire avec Vincent, le jeune couple tombe sur un reportage à la TV sur le sujet. Ils commencent à en parler mais sans pour autant se projeter véritablement…

Quelques années plus tard, le déclic survient. « On a lu un reportage sur l’adoption et la GPA (NDRL : Gestation Pour Autrui) dans Tétu, un magazine gay. On s’est dit que c’était possible ! ».

Le couple imagine d’abord se lancer dans un process d’adoption. Mais ils abandonnent rapidement. « On a compris que l’on devait adopter en tant que célibataire et pas comme un couple, parce que nous étions deux hommes. Et on ne voulait pas cacher nos vies ».

Comme Emil de « Chez Papa Papou », Ils décident alors de se renseigner sur la GPA (NDRL : la GPA est interdite en France). Etant chacun propriétaire de leur appartement, ils décident d’abord de vendre leurs biens immobiliers pour rassembler les fonds nécessaires au parcours. « Nous n’avions pas de freins psychologiques mais beaucoup de questions ! ». Ils se renseignent alors auprès de l’APGL ( NDRL : association gay)  qui leur donnent les clés et contacts nécessaires pour se lancer dans l’aventure…

L’aventure avant de devenir 2 papas

Six mois après, le couple part à Londres pour rencontrer une agence de coordination de GPA. Le feeling n’est pas là et c’est avec une agence à Boston, aux Etats Unis, que Geoffrey & Vincent se lancent dans le process en 2009.

Et contrairement à certains croyances encore très présentes, une GPA peut prendre du temps. « Cela a pris six longues années avant de concrétiser notre rêve. Nous avons vécu plusieurs fausses couches et une première mère porteuse qui a arrêté pour problèmes familiaux. Puis nous avons rencontré Tina lors d’un rendez-vous à New York, une jeune femme incroyable. Elle a décidé de nous choisir et de nous aider à devenir papa ». Une vraie relation se noue, un engagement mutuel, un pacte. Tina accepte de porter leurs futurs jumeaux. « J’ai moi même un frère jumeau donc j’avais très envie d’avoir des jumeaux à mon tour ! ».

Le proces de six années (6 FIV sont nécessaires au total) avant de devenir papa n’est pas facile à vivre au quotidien. « Au début, nous en parlions beaucoup à nos familles et amis. Puis nous avons décidé d’arrêter. Nous avions besoin de nous protéger. On s’est un peu renfermé sur nous-mêmes en prévenant nos proches « On en parlera quand ça ira ». Une GPA, c’est bien sur du médical mais c’est aussi beaucoup d’émotions, d’engagements, de sentiments… Mais sans vraiment pouvoir être acteur ». Et vivre cette aventure à des milliers de kilomètres rend la sérénité difficilement accessible.

Les premiers pas des 2 papas

peau à peau papa

En 2015, ça y est, la grossesse est en cours et se déroule très bien. L’accouchement est prévu au 1er Juin. Mais avec une grossesse gémellaire, le risque de prématurité est grand. Les médecins conseillent donc aux futurs papas d’être aux Etats Unis dès début Mai. « J’ai posé un congé sans solde de 6 mois et nous sommes partis le 19 Avril. Nous voulions profiter de Tina et vivre les derniers jours de sa grossesse avec elle et l’aider au maximum ». La proximité virtuelle qu’ils avaient connue durant des mois se transforme en proximité réelle. « On a été intégré immédiatement à sa famille, c’était magique ! On a loué un appartement à côté de chez Tina et à 3 mn à pied de l’hôpital. On a sympathisé avec ses voisins avec qui nous sommes toujours en contact ! Vincent fêtait son anniversaire quand nous y étions et nous l’avons fêté tous ensemble, comme une famille». D’ailleurs, encore aujourd’hui, ils sont toujours en relation avec Tina. « On la voit tous les jours, elle est en photo dans le salon ! Et nous échangeons régulièrement, même si bien sur, chacun a sa vie».

Le 29 Avril, le jeune couple est avec Tina pour une écho de contrôle. « Le médecin nous dit alors qu’il y en a encore pour 10 jours et nous conseille d’en profiter pour aller visiter le Grand Canyon.  Ce que nous décidons de faire ». Heureusement le décalage horaire a raison du réveil très matinal. Ils ratent leur départ pour leur escapade… Et quelques heures après, Tina part à l’hôpital pour accoucher ! « Les enfants sont nés le 30 Avril par césarienne. On a assisté à l’accouchement, qui a été compliqué pour Elliot. Nous étions très inquiets mais le personnel médical nous a accompagnés et nous a immédiatement considérés comme les parents. Nous avons effectué  tous les soins dès le début, nous avons pu faire du peau à peau de suite. On a vécu un concentré d’émotions mais on s’est senti de suite à l’aise dans nos nouveaux rôles de papas ».

Robin est sorti de l’hôpital au bout de 5 jours et Eliott y est resté 11 jours. « On a vécu les débuts de notre famille séparés. Nous effectuions  des rotations, l’un à l’appartement avec l’un de nos fils et l’autre à l’hôpital avec son jumeau ». Un peu moins d’un mois après, les passeports des enfants en poche, ils décident de rentrer en France. « Nous pensions rester plus longtemps aux Etats Unis mais nos familles nous manquaient ! Nous étions impatients  de partager ces moments avec eux ! ». A leur retour, une nouvelle vague d’émotions les submerge. « Toute notre famille nous attendait… C’était très beau ».

Une famille du quotidien

Une fois rentrés, les 2 papas vont vite être dans le bain. « Vincent a repris le travail au bout de 3 jours. Et moi, j’ai trouvé rapidement mon rythme ! J’appréhendais un peu de donner les biberons seul aux deux bébés. Mais j’ai trouvé mon organisation. Finalement, à part le manque de sommeil, la 1ere année était plutôt facile ! Et encore, ils ont fait leurs nuits au bout de deux mois et demi… mais on se couchait en même temps qu’eux, à 21h !».

Les 2 papas ont vécu pleinement cette parentalité de jumeaux, un peu à part. « Il faut un peu être au « garde à vous ! », c’est quasi militaire. Il y a beaucoup de mécanismes avec des jumeaux dans le rythme au début ». Au delà de la gestion du quotidien, les 2 papas ont aussi savouré tous ces moments. « Nos jumeaux sont très différents. C’est une chance finalement de vivre une double parentalité mais au même moment. L’un a besoin de mots quand l’autre a besoin de caresse ». Et il y a aussi une double parentalité à vivre en étant 2 papas. « On a le double rôle de papa et de maman. Nous sommes maternant… en étant papa ! ».

Pour profiter au maximum de ses jumeaux, Geoffrey décide, suite à son congé sans solde de 6 mois, de prendre un congé parental de 2 ans. « Je suis resté quasiment non stop avec mes fils durant 30 mois. Et avec le recul, je recommencerai sans hésiter ! Les liens avec un enfant se créent au début. Ma maman était femme au foyer. Et j’ai toujours su que je voulais aussi vivre pleinement ces premières années avec mes enfants ».

Une famille avec 2 papas…. et alors !

jumeaux

Dans les rues de Cannes qu’il a arpenté chaque jour durant ses 30 mois de congé parental, tout le monde connait Geoffrey et sa double poussette. « Toutes les mamies m’appelaient le « Monsieur à la poussette rouge » ! ». En 5 ans, les 2 papas n’ont jamais subi de moqueries ou de regards en coin. « Nous sommes très à l’aise au quotidien. Nous sommes une famille comme les autres. Nous sommes souriants, avenants et pas dans la réserve, cela aide aussi ». Geoffrey a hésité un temps à ouvrir son compte Instagram où il partage sa vie de papa. Puis il a sauté le pas. Et là également, il n’a jamais reçu de critiques négatives sur lui ou sa famille.

Cette bienveillance, les 2 papas la vivent également à l’école (catholique) de leurs enfants. Eliott et Robin sont également très à l’aise avec cette situation. « Je me souviens d’une sortie scolaire en 2eme année de maternelle où j’ai surpris mes enfants dire « Moi j’ai 2 papas ! ». On a même entendu des camarades de leur classe déclamer à leurs parents « moi je veux 2 papas comme Eliot et Robin ! » ». 

Au delà de la bienveillance, les 2 papas veulent transmettre à leurs enfants la notion de respect et d’ouverture d’esprit

Au delà de la bienveillance, les 2 papas veulent transmettre à leurs enfants la notion de respect et d’ouverture d’esprit. « C’est ce que nous attendons pour nous. Il est essentiel qu’ils soient également ouverts et respectueux envers les gens et le monde ». Et comment s’imagine le papa de 39 ans dans 10 ans ? « Je serai vouté à force de leur porter des choses ! Et fatigué ! Je pense qu’on sera également des globe trotteurs à 4. Et je serai content de les voir prêts à s’envoler… ». Et les 2 papas auront alors en tête tous ces moments d’amour intense vécus. « J’aime tellement de moments avec eux. Quel bonheur de les voir se blottir spontanément dans mes bras à leurs réveils ou de les entendre au coucher nous faire une « bataille » de superlatifs de déclaration d’amour durant 5mn » Une bien jolie famille… comme les autres.

Et vous, que pensez-vous de l’histoire de ces 2 papas ?

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Crédits photos : les papas interviewés

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4 commentaires sur « J’ai 2 papas …. et alors ! »

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